L’Initiative ne pourra déclarer que la polio a été éradiquée qu’au terme d’opérations de surveillance approfondies. Tout d’abord, chaque pays doit annoncer qu’il a mis fin à la transmission de la maladie. La campagne peut alors entamer le compte à rebours qui la mènera à l’éradication mondiale : ce que les chercheurs appellent la «dernière étape». Si aucun poliovirus sauvage n’est détecté dans le monde pendant trois ans, l’éradication de la polio sera officiellement déclarée. La certification — ou l’approbation — émanera de la Commission de certification mondiale, un conseil d’experts indépendant.

Plusieurs régions définies par l’OMS sont déjà parvenues à ce stade. Dans la région Amériques, le dernier cas de polio a été détecté en 1991 ; l’éradication de la polio dans cette région à été certifiée en 1994. En 2000, c’est la région Pacifique de l’Ouest (Chine comprise) qui a obtenu la certification. La région Europe, qui comprend une partie de l’ex-Union soviétique, devrait être déclarée exempte de polio en 2002. Il ne reste plus maintenant qu’à éliminer la polio dans seulement 10 pays d’Afrique et d’Asie du Sud.

Les activités à entreprendre à la suite de l’éradication sont également en cours de planification. Bien que le poliovirus sauvage doive bientôt être éliminé, les laboratoires de recherche et les fabricants de vaccins en gardent des exemplaires. Ces établissements doivent être hygiéniques et sécurisés de façon à minimiser le risque de réintroduction du virus dans l’environnement naturel. Tout comme dans le cas de la variole, quelques souches du virus devront être stockées aux fins de la recherche dans un lieu placé sous surveillance, avec des réserves adéquates de vaccins.

Le Plan d’action mondial de l’OMS pour le confinement en laboratoire des poliovirus sauvages définit à ce sujet des consignes précises. Ce plan réduit considérablement le risque de réintroduction du poliovirus sauvage dans l’environnement naturel. Ces mesures de confinement du virus doivent être mises en place avant la certification mondiale de l’éradication de la polio, prévue pour 2005.

Dans de très rares cas, le virus atténué à partir duquel le vaccin oral de la polio est fabriqué peut se propager au sein de la population et finir par redevenir une forme de virus qui entraîne la paralysie. Cela se produit dans les régions où le taux de couverture vaccinale est faible, comme par exemple dernièrement aux Philippines et sur l’île d’Hispaniola. Des campagnes de vaccination à grande échelle ont permis de mieux immuniser la population et d’endiguer ces cas. Cependant, il sera nécessaire, en raison de ce phénomène, de faire preuve d’une très grande coordination internationale lorsqu’on décidera, à terme, de mettre fin aux vaccinations contre la polio. Une autre question délicate consiste à déterminer la probabilité selon laquelle un virus provenant d’un vaccin atténué pourrait rester en vie dans l’organisme d’une personne immunisée et devenir ensuite virulent. Ce problème n’a été constaté que chez un nombre très restreint de personnes atteintes d’immunodéficience.

Ces questions ne pourront être résolues qu’à terme. C’est aux gouvernements qu’il appartient en dernier recours de décider des politiques de vaccination à adopter après l’éradication de la polio, en se prononçant sur la question lors d’une future réunion de l’Assemblée mondiale de la santé. L’éradication mondiale de la santé, qui est maintenant à notre portée, représente un énorme progrès sur le plan humanitaire et marquera la fin des campagnes de vaccination à grande échelle. Cependant, les vaccinations systématiques contre la polio se poursuivront sans doute à l’échelle mondiale dans un proche avenir.



© Sebastião Salgado

Etats-Unis d’Amérique
Des échantillons de souches de poliovirus sauvage provenant de pays où la polio a déjà été éliminée sont entreposés sur une étagère aux Centers for Disease Control and Prevention (CDC) d’Atlanta. Après l’éradication officielle de la polio à l’échelle mondiale, le CDC sera un site sécurisé de stockage à long terme du poliovirus.